Le bridge et la triche (première partie)

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Le monde du bridge a récemment été secoué. Des cas de tricherie ont été suspectés ces dernières semaines et nous souhaitons partager l’information avec vous aujourd’hui sur le blog Funbridge. Les tricheurs sont assez rares au bridge mais ils existent, comme dans tout sport malheureusement.

Boye Brogeland, grand joueur et champion norvégien a accusé la paire israélienne Fisher et Schwartz de tricherie. Brogeland et l’équipe Schwartz (Richie Schwartz, Allan Graves, Espen Lindqvist) ont décidé de rétrocéder leurs trophées remportés en 2014 et 2015 (le Trophée Spingold, le Trophée Reisinger et le North American) lorsqu’ils étaient coéquipiers de la paire israélienne.

Brogeland a créé un site Internet – bridgecheaters.com – où il relate les faits et met en évidence ses suspicions .

Nous avons traduit pour vous la première page de son site Internet :

« Une partie de l’histoire » par Boye Brogeland

Certains d’entre vous reconnaîtront sûrement mon nom après les tremblements de terre qui ont secoué le monde du bridge au cours de ces dernières semaines. Pour ceux qui ne me connaissent pas encore, j’ai 42 ans et je suis marié avec 2 enfants (âgés de 1 et 10 ans). Je vis à Flekkefjord, en Norvège, et j’ai grandi dans une petite ville voisine appelée Moi. Mes grands-parents m’ont appris le bridge quand j’avais 8 ans et depuis, j’adore ce jeu. Je suis rédacteur et propriétaire d’un magazine de bridge, et j’écris une rubrique journalière sur le bridge dans Dagbladet. Je joue aussi pour l’équipe Open de Norvège depuis 1996 avec laquelle j’ai remporté le Bermuda Bowl en 2007 et les Championnats d’Europe en 2008 pour ne citer que les grands moments. Je participe aux Championnats nationaux américains (American Nationals) depuis 1999 et j’ai gagné plusieurs championnats nord-américains.

Lors des deux dernières saisons, j’ai joué dans l’équipe Schwartz aux côtés de Lotan Fisher et de Ron Schwartz. […] L’équipe Schwartz a remporté le Spingold 2014, le Reisinger 2014 et le Jacoby Swiss 2015, en plus d’obtenir d’autres bons résultats.

J’avais l’impression d’avoir noué une bonne relation avec les jeunes israéliens qui ont rejoint l’équipe Schwartz durant l’été 2013. Ils semblaient être sympathiques même s’ils étaient assez différents. En effet, Lotan était effronté et franc, alors que Ron était plus humble et calme. Nous sommes allés dîner à de nombreuses reprises ensemble, commandant des sushis, notre plat préféré à Lotan et à moi. En avril de cette année, j’ai joué avec Lotan lors de la Yeh Bros Cup à Shanghaï dans l’équipe Vitas. Nous étions amis.

J’ai entendu des rumeurs de tricherie sur cette paire de la part de nombreuses personnes. Mon impression générale est qu’il y a peu de vraie tricherie au bridge (je ne me suis senti « volé » qu’une seule fois contre une paire indonésienne il y a de nombreuses années, mais la Norvège a continué à s’imposer lors de ces matchs). Je ne croyais donc pas (ou ne voulais pas croire) que mes coéquipiers et amis manigançaient quelque chose. Si j’avais su, je n’aurais pas continué à jouer avec eux. Je les ai aussi encouragés à garder un jeu « propre » et à faire tout leur possible pour éviter d’autres rumeurs.

J’ai pourtant été confronté à de la mauvaise éthique à de nombreuses reprises, mais c’est autre chose. Bien sûr, nous devrions tous essayer de jouer à notre plus haut niveau […], mais dans un jeu avec un partenaire, vous serez toujours confronté à une sorte de zone d’ombre.

Alors pourquoi n’ai-je pas refusé de jouer avec Lotan et Ron avec toutes ces rumeurs qui circulaient ? Et bien, j’aime juger les gens par moi-même, laisser aux gens une chance de prouver qu’ils sont différents de ce que certaines personnes affirment. Au bridge, il y a de nombreux « cercles » sur le circuit professionnel et chaque cercle semble avoir certaines règles bien à lui et d’autres règles pour le reste du monde. Ce n’est pas bien. Personne n’est au-dessus du jeu.

À cause des rumeurs, j’ai mené ma propre petite enquête par moments. Lorsque leur(s) action(s) ne correspondai(en)t pas à ma logique bridgesque, je leur demandais : « Quelle était votre logique sur cette main ? ». Ils me répondaient toujours de manière expéditive mais leurs réponses me maintenaient toujours sur mes gardes.

[…], j’aimerais attirer votre attention sur la façon dont selon moi, nous devons nous y prendre pour attraper les tricheurs de classe mondiale au bridge.

[…]

Le bridge est un tel jeu de logique que je suis prêt à affirmer qu’il est presque impossible de tricher contre ses pairs au plus haut niveau pendant longtemps. […]

Mon approche pour débusquer la tricherie chez les joueurs de classe mondiale est de s’intéresser aux actions non évidentes et à leur taux de succès. Si vous prenez 100 donnes pour lesquelles Versace, Helgemo et Hamman sont confrontés au même problème, combien d’actions non logiques pensez-vous qu’ils choisiront ? Aucune, je pense. Donc lorsque les joueurs et les paires choisissent des actions non logiques, qui en plus ont un taux de succès élevé (les actions sont considérées comme non logiques car vous vous attendriez à ce qu’elles aient un taux de succès bien inférieur à 50%), cela doit nous faire tiquer. C’est à l’usage qu’on peut juger.

Vous pouvez retrouver sur son site Internet une partie où sont analysés les différents “signaux” potentiellement utilisés par la paire pour tricher. Brogeland évoque notamment la toux et le placement du plateau à enchères. Voici son analyse :

  • Lorsque la donne est placée là où elle est censée être, au centre de la table, cela indique une préférence pour les carreaux.
  • Lorsque la donne est poussée sous l’écran du côté de l’entameur, cela indique une préférence pour les piques.
  • Lorsque la donne est placée de manière à ne pas être visible par l’entameur, cela indique une préférence pour les trèfles.
  • Lorsque la donne est placée dans le coin de l’écran, cela indique une préférence pour les cœurs.

Voici par exemple la donne n°17 des championnats européens où ils étaient en défense contre la Norvège. Retrouvez les autres donnes en cliquant ici.

 

2 commentaires

  1. […] de la paire israélienne Ficher – Schwartz par Boye Brogeland dont vous nous parlions ici,  un nouveau cas de triche a été mis en évidence cette fois-ci par le site bridgewinners.com. […]

  2. Etant un joueur modeste, je suis écoeuré de voir des joueurs d’un tel niveau se laisser aller à tricher! Je pensais que cela n’était que du domaine des médiocres. Mais malgré leurs capacités intellectuelles, ce ne sont que des médiocres! J’étais un fervent du bridge mais ces tricheurs à un haut niveau me dégoûtent!

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